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 Éveil. Ended.

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Nami
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MessageSujet: Éveil. Ended.   Éveil. Ended. Icon_minitimeLun 30 Avr - 1:30

Détruire, en essayant de sauver.
C’est ainsi que Meian avait perdu tout ce qu’elle aimait. Tout lui avait monstrueusement échappé, comme si elle avait été jugée indigne de prendre entre ses mains frêles toutes ses choses fragiles liées à la vie et à l’amour. Tout était progressivement devenu silencieux en elle. Tout s’était tût. Tous les sentiments qui autrefois avaient fait rougir ses joues, et qui avaient fait trembler ses jambes. La chair de poule qui avait autrefois glacé sa peau, la sensation de chaleur fasse aux émotions trop fortes ; elle n’en avait plus. Elle était vidée. Elle était une carcasse à l’abdomen défiguré, et à la moitié de cœur meurtri. Trop meurtri pour battre sans douleur. Lassé de se battre avec son immortalité, il semblait vouloir tout arrêter. Se reposer. Et retrouver sa moitié là où tout était tranquille. Pourtant elle était là. Petit être perdu dans l’animation du monde. Fillette aux allures humaines, marchant loin de la foule. Âme qui ne savait hurler sa peine, mais qui souffrait silencieusement de sa perte. Néanmoins, aujourd’hui elle était là pour son propre désir. Elle avait quitté l’arche. Le Comte. La maison perdue sous la neige de Russie, qu’Angel avait si gentiment partagé avec elle. Elle avait fuit Nemesis qui se faisait de plus en plus présent là où elle était. De plus en plus effrayant. Elle avait même fuit la surveillance d’Ernest, qui tout en étant sous ses ordres, ressemblait plus à un gardien, qui devait la garder dans le droit chemin. Elle avait fuit tout ce qui, malgré ses efforts, s’était raccroché à elle depuis qu’elle était devenue un être immortel, et elle continuait à tendre la main vers les fantômes de son passé. A entrouvrit les lèvres sans pouvoir les appeler. Et ils s’approchaient, l’observant de leurs yeux creux, mais jamais ils ne s’approchaient assez pour qu’elle puisse les toucher. Toujours gardaient-ils une distance adéquate pour la laisser seule. Seule entre deux monde ; celui dans lequel elle avait échoué, et celui du passé auquel elle était étroitement liée. Et parmi eux, se tenaient l’image translucide de sa sœur. Et pour elle, elle courrait, dans ses rêves endormis, dans ses rêves éveillés, dans ses songes enfuies, dans la réalité… Elle courrait, toujours plus vite, tendant les deux bras avec désespoir, mais si les fantômes se pressaient autour d’elle, celui de sa sœur se faisait discret, absent. Etait-il vraiment là ?

Un sursaut. Posant une main sur sa poitrine, l’adolescente ouvrit ses yeux bleus et creux. Elle retint sa respiration, et ses pupilles scrutèrent ce qui l’entouraient. Elle décolla son dos du mur contre lequel elle s’était laissé choir. Angel l’avait obligée à s’habiller, à prendre soin d’elle, aussi avait-elle jetée sa robe déchirée, et la cicatrice épaisse, rugueuse, affreuse qui décorait son ventre n’était donc pas visible sous la nouvelle robe bleutée qu’elle portait. Ses cheveux noirs étaient déliés, et tombaient sur chaque épaule pour tomber vers ses jambes. Poussaient-ils encore ? Elle savait seulement qu’elle ne s’en occupait plus. Il était inutile d’approfondir sa beauté lorsque cette dernière n’était qu’une honte face à sa monstruosité. Elle avait toujours aimé protéger, construire, embellir, mais maintenant, alors qu’elle levait les paumes vers le ciel et qu’elle observait ses doigts fins, elle avait peur, parce qu’il lui semblait que ces mains frêles n’étaient plus que les outils maladroits, et incapables de faire quelque chose de bien.

Le monde avait tout à fait le droit de souffrir à présent. Il était injuste. Qu’elle disparaisse, elle, créature d’une révolution nouvelle, au bord de l’immortalité, cela n’était rien. Que sa jumelle, fragile, éblouissante, puisse s’éteindre sans que le monde s’inonde de larmes, était inacceptable. Elle ne savait pas quoi faire, ne pouvant laisser mourir ce corps immortel malgré son apparence fragile. Mais puisqu’elle devait rester ici, autant qu’elle soit une horreur pour le monde. Ce monde qui depuis son enfance, l’avait entraînée dans les tempêtes les plus torrides, la jetant dans des océans tumultueux. Entraînant sa jumelle également, et les faisant choyer loin de l’autre, séparant un cœur uni en deux moitiés, à la plaie béante. Et elle avait subit cela dans le silence le plus parfait. Comme si l’eau de la mer avait empli sa bouche, et que ses cristaux salés avaient marqué ses lèvres et sa langue. Sous le déluge, elle avaient protégé ses deux yeux gigantesques sous ses paupières semblables à de sombres ombrelles. Incapable de voir, de crier, de respirer, elle s’était laissée entraînée par le courant, pauvre et pitoyable chose. Pourtant elle se forçait à lever le menton, là, devant cette foule d’humains qu’elle avait autrefois rejoint avec aisance. Elle se forçait à paraître forte alors qu’elle n’avait plus rien. Absolument rien. Son corps, en hoquetant tel un oisillon, sembla s’activer. Elle s’anima, comme si son cœur dont la clef avait été arrachée s’était transformé un grenade, et que chacun de ses battements précipitait le déclenchement de son explosion. Avec une sorte de détermination timide, elle se mit à marcher, et ses cheveux ressemblaient à des ailes soyeuses de corbeaux qui dansaient autour d’elle. Elle eut envie de s’envoler, mais si autrefois elle avait rêvé des étoiles, le jour était depuis longtemps venu où les nuages orageux et ternes s’était interposés entre elle et le ciel, et la foudre avait cramé ses ailes fragiles réalisées en rêve, et fumante encore de sa naïveté, elle s’était écrasée sur le bitume ici bas.

Before our innocence was lost,
You were always one of those,
Blessed with lucky sevens,
And the voice that made me cry.

De ce qui autrefois avait été un rêve, des mots chers et fous suaves à ses oreilles, maintenant ne persistait que la saveur de la vengeance, brûlante, comme si ses épices s’étaient éparpillées sur son cœur. Et son esprit troublé ne pouvait qu’y prendre goût. Elle qui autrefois n’avait sut faire de mal à la plus mauvaises des mouches, étaient prête à faire subir l’apocalypse à tout ceux qui avaient le malheur de se trouver assez près de l’oiseau de malheur qu’elle était. Et ces jambes d’oiseau la menèrent au cœur de Paris. Là elle y trouva une fontaine. Elle posa des yeux désinvoltes sur l’eau miroitante. Une sorte d’arche s’élevait au-dessus de la fontaine, et dans ses murs s’étaient faits sculptés des créatures fascinantes et des anges aux visages adoucis. La Fontaine des Innocents. Avec lenteur, elle s’approcha, et laissa glisser ses doigts sur la pierre froide. Elle caressa le visage d’une nymphe à l’air triste. Les lèvres de la noah tremblotèrent, alors qu’elle tenta de chantonner, comme elle le faisait autrefois pour contenir ses émotions. Chanter au lieu de pleurer. Sourire au lieu de crier. Amour inconditionnel. Mais fané, comme une fleur assoiffée. Elle scruta les créatures de pierre, contournant la fontaine en laissant sa main glisser. Puis elle s’arrêta, et observa autour d’elle à nouveau. Elle n’était pas seule. Des voix murmuraient autour d’elle. Comme les fantômes dans sa tête. Des regards se promenaient partout, parfois sur elle, et alors des pupilles étonnées se faisaient trop curieuses. Des éclats de rire éclataient parfois. Meian se redressa un peu plus, le regard vague. Qu’on lui rende sa sœur. Qu’elle rit aussi. Qu’elle pleure peut-être, mais qu’elle soit là. Qu’elle soit resplendissante, comme elle avait toujours sut l’être. Qu’on la lui rend, pour qu’elle puisse se blottir contre elle. Reconstruire son cœur. Qu’on lui rende sa jumelle, pour qu’elles puissent se promener pieds nus à nouveau, main dans la main, leurs cheveux ténébreux se mêlant. Qu’elles puissent s’aimer d’un simple regard, se sauver d’un simple sourire. Qu’on la lui rende, ou qu’on la laisse la rejoindre.

Que la tempête éclate.

Des ombres se soulevèrent autour d’elle ; des mains griffues qui glissèrent sur les surfaces que le soleil couchant n’éclairait plus. L’arche de la Fontaine des Innocents devint noir alors que des ombres l’enveloppèrent. Des cris se firent entendre alors que des passants écarquillaient leurs yeux face à cette étrange scène. Les yeux de la Noah furent les seules choses claires en elle alors que l’utilisation de ses pouvoirs dévoila une peau grisâtre de noah, et qu’une couronne de croix s’afficha sur son front, dénonçant son statut de princesse foutue errante dans un royaume perdu. Une couronne qui lui rappelait à quelle point sa destinée était tracée pour l’éloigner de sa sœur. Pour accroître la distance entre leurs deux cœurs. D’une manière si atroce que même leur mère n’aurait osé le faire, lorsqu’elle avait voulu les rendre indépendantes, il y a des années déjà. Elle n’avait pas réussit. Mais les exorcistes oui. Et les noah aussi. Elles s’étaient fait prendre dans le jeu de la guerre, et elles s’étaient retrouvées sur le champ de bataille, dans les camps ennemis. Cette guerre avait emporté la vie de l’une, ou ainsi sa jumelle le croyait, et cette guerre avait semée l’autre dans les méandres, les nimbes douloureuses de la solitude. Meian redressa la tête, et ses mèches ténébreuses glissèrent sur son visage, dévoilant des lèvres crispées en un sourire triste mais déterminé. La vague d’ombre qu’elle créait s’étendit vers les bâtiments les plus proches, et, silencieuses et destructrices, elles s’infiltrèrent dans les fissures les plus infimes de leurs parois, et menacèrent de tout faire s’effondrer. Les parties les plus fragiles s’effondrèrent en morceaux sur le sol, éclatant et résonnant de bruits sourds. Puis les murs les plus costauds tremblèrent, se balançant sur ses fissures comme s’il s’agissait d’un fil prêt à lâcher. On ne savait de quel côté ils allaient s’effondrer. Cela provoqua des tremblements à même le sol, et dans son dos, Meian vit que là où l’eau de la fontaine avait été paisible, elle était maintenant agitée, comme paniquée d’être enfermée dans son réceptacle de pierre alors que la terre frissonnait non loin d’elle. Les ombres claquèrent comme des fouets sur les hommes trop paniqués et figés sur leurs pieds. Ils tournèrent le dos, et s’enfuirent. Les ombres ne tuèrent pas, mais Meian ne sut si les éboulements épargnèrent tout le monde. Elle ne savait ce qu’elle faisait exactement, mais enfin, pour la toute première fois, elle laissait sa colère se manifester. Sa haine, et son chagrin, s’animer comme s’il s’agissait de bêtes endormis, de chimères rugissantes ou larmoyantes qui, se matérialisant en ombres, lacéraient ce qui ce trouvait autour d’elle. Les dalles de pierre grincèrent comme de la ferraille sous les pieds de la noah. Les ombres l’entouraient, comme si elle se trouvait au sein d’une tempête dont le cœur était calme, mais les extrémités violentes. D’une secousse plus forte encore, l’eau de la fontaine gicla sur les dalles, et ruissela sur les marches de pierre. Des morceaux de bâtiments semblèrent se faire engloutir par des gueules monstrueuses.

Et le soleil se couchait dans le ciel rougeoyant, spectateur ensommeillé qui en s’éclipsant, approfondissait l’emprise des ténèbres. Mais même si le cœur de Meian tressautait à cause des tremblements sous ses peids, elle était silencieuse. Et à présent elle était seule. Et pendant un moment, elle s’enferma dans son tourbillon d’ailes duveteuses, qui dans leur hâte ne manquaient pas de l’effleurer.

Et je suis heureuse de mon sort, car je n’aurai pas voulu d’une éternité sans toi.
Le vent sembla extirper ces paroles du royaume des dieux, comme si Nyx et Héméra les lui envoyaient sur le dos d’une lueur grisâtre que formait leurs deux éléments si opposés. Le clair-obscur. C’est ce qu’elle était. Et en entendant ces mots elle sembla s’effondrer. Heurtant le bitume à nouveau. Se pliant en deux, et défiant ses natures de Noah, pleurant des larmes invisibles. Ses doigts, crispés comme les serres d’une oiseau, vinrent agripper sa tête, et sa bouche s’ouvrit en un cri silencieux. Muet. Et tout cessa. Les ombres s'évaporèrent, se cachèrent, et seul un halo de soleil éclairait les alentours déserts. Les yeux exorbités, le cœur prêt à exploser, elle se laissa choir sur le bord de la fontaine, laissant les gouttes d’eau se déposer dans sa chevelure. Un frisson secoua son corps immortel. Puis un masque se posa, un masque indifférent. Presque cruel. Et si sa peau se fit à nouveau blafarde, et si son front repris l'apparence claire de celui d'une jeune fille, son regard trahissait son espèce et son assurance. Et bien que son cri muet cessa, et que ses yeux se firent secs, asséchés, au fond de sa moitié de coeur s'accrochaient quelques lambeaux de rêves.

Emmène-moi avec toi, Hikari. Emmène-moi.
Je t'en supplie...

I need to run far away
Can't go back to that place
Like she told me
I'm just a big disgrace
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Nami
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MessageSujet: Re: Éveil. Ended.   Éveil. Ended. Icon_minitimeLun 30 Avr - 1:30

Éveil. Ended. 3np4n
Music please~♪♫
https://www.youtube.com/watch?v=UcWU-D4AVXc

Elle était humaine. Elle voulait l'être. Elle ne voulait pas être différente. Cela l'effrayait depuis toujours. La différence avait toujours été quelque chose que les autres n'avaient jamais pardonné. À chaque fois qu'une personne ne rentrait pas dans les moules imposés, cette dernière se faisait impitoyablement rejeter, sans avoir la moindre chance de pouvoir s'expliquer sur le pourquoi du comment. Comme si le simple fait qu'elle puisse exister était répugnant, comme si le droit de vivre comme les autres lui était formellement interdit. Condamnée aux tourments et à la solitude. Anne connaissait cela, ayant elle-même été ce qu'on pourrait appeler une victime de ce comportement propre aux êtres humains. À cause de ses cheveux blancs premièrement. Ridicule comme raison, n'est-ce pas ? Et pourtant, cela avait bel et bien été l'une des causes qui l'avait poussé à s'éloigner des autres. Moqueries des plus jeunes, mots blessants... Pendant un temps, elle avait encaissé. Sans rien dire. En gardant le sourire comme si elle n'avait rien entendu. Mais un jour, elle en eut marre. Tous ces mots la blessait, comparable à des aiguilles que l'on prenait plaisir à enfoncer sous sa peau, profondément dans sa chair, dans son âme. Ça faisait tellement mal, qu'au final, elle avait finit par s'éloigner. Elle s'en sortait très bien toute seule, l'amour et l'attention de ses parents lui suffisaient amplement, après tout. Ou, tout du moins, elle avait essayé de s'en convaincre. Et elle y avait crut, pendant un temps. Jusqu'à ce que tout s'écroule. Jusqu'à ce que tout soit détruit, ne lui laissant aucune chance de se reconstruire. Et pourtant, elle avait essayé. Elle avait espéré. Et c'était ce même espoir qui l'avait fait chuter. À trop espérer, elle avait voulut atteindre ce qui lui serait à jamais inaccessible. C'était beaucoup trop haut pour elle, trop loin. Ses doigts ne faisaient que frôler ce point qu'elle convoitait tant. Puis un jour, sans qu'elle sache comment ni pourquoi, elle était tombée. D'une façon brutale, violente. Tout son être s'était fissuré, son âme meurtrie... Elle avait voulut crier, appeler à l'aide, mais il n'y avait personne. Elle était seule. Il faisait tellement froid dans la bulle dans laquelle elle s'était enfermée. Elle était en partie responsable de la situation dans laquelle elle se trouvait. Mais elle ne voulait pas l'accepter. Elle ne pouvait pas. Cela la faisait encore plus souffrir d'admettre une telle chose, ça la rendait encore plus honteuse. Si elle n'avait pas été si idiote par le passé, elle n'en serait pas là. Dans toute cette histoire, la seule qui devait être blâmée, c'était elle. Anne Eléonore Brandford de son nom complet. Elle se détestait pour cela. Elle se détestait d'être si faible. Elle n'avait pas sut comment s'y prendre, elle avait eut trop peur des autres et de leurs mots aussi tranchants que des poignards. Elle ne pouvait s'en prendre qu'à elle-même au lieu de haïr toujours plus ce monde dans lequel elle n'avait pas confiance. Il la décevait, comme toujours. Il lui prenait ce qu'elle avait de plus cher, l'isolant encore plus qu'elle ne l'était déjà. Mais elle n'en pouvait plus. Ça la tuait tous les jours un peu plus, ça la rongeait de l'intérieur.

Son regard gris ne quittait pas la vitrine poussiéreuse, comme totalement captivé par ce qui se trouvait à l'intérieur de la boutique. Des livres, des bibelots en tout genre, des poupées en tissus. Il y en avait vraiment pour tous les goûts. En temps normal, Anne se serait dépêchée de rentrer dans le petit établissement, et aurait examiné tous les objets qu'elle aurait jugé d'intéressant. Mais là non, elle n'en avait pas envie. En fait, pour tout dire, ces derniers temps, elle n'avait envie de rien, elle se laissait porter par les évènements, sans jamais lever le petit doigt. De toute façon, elle préférait être spectatrice plutôt qu'actrice, c'était beaucoup moins difficile d'observer. Elle ne bougeait pas d'un pouce, se contentant d'observer le reflet que lui renvoyait la surface de verre qui la séparait des objets. Elle se faisait pitié... Si ce n'était pas malheureux d'en arriver là tout de même. Un soupir s'échappa d'entre ses lèvres. Bref. Las. Elle en avait plus que marre de cette situation, il serait peut-être temps qu'elle évolue. Son regard d'un joli gris était trop morne. Trop morne pour être celui d'une jeune fille de dix-sept ans tout juste. Il indiquait clairement que la demoiselle n'attendait plus rien. Sa chevelure rivalisant avec la blancheur de la neige était impeccablement coiffée. Sa frange qui devait maintenant lui arriver au niveau des pommettes était retenue par un simple bandeau fait par un large tissus bleu. Bleu comme sa robe. Comme ses souliers poussiéreux. Ses mains se posèrent sur ses hanches, lissant soucieusement les plis de sa robe. Elle se trouvait misérable. Que faisait-elle ici, à contempler cette autre ''elle'' ? Elle devait avoir d'autres choses plus intéressantes à faire. Oui. Sûrement. L'air subitement mal à l'aise, elle détourna le regard et fit un pas en avant, se fondant dans la foule.
Rapidement, elle évitait les épaules trop robustes pour elle. Habilement, elle évitait les talons trop durs qui n'auraient pas manqués ses pauvres pieds si elle ne les avait pas vu plus tôt. Personne ne faisait attention à elle, comme d'habitude. Il était blessant de constater à quel point elle pouvait passer inaperçu...

Son esprit divagua quelques instants, ne prêtant guère attention à l'endroit où ses pas la menaient. Elle se fichait totalement de savoir où elle allait. Elle avait juste besoin de marcher un peu, de prendre l'air. Le regard dans le vague, elle continuait d'avancer à travers la foule, tel un fantôme.

Ablyss. Anne ne savait pas vraiment pourquoi elle pensait à lui en cet instant. Peut-être était-ce parce qu'elle avait envie de le voir. Histoire de se sentir moins seule, parce qu'elle l'aimait bien, au fond, même si elle ne l'avouerait pour rien au monde... Ses doigts se saisirent de l'une de ses mèches qu'elle jugeait de rebelle et s'empressèrent de la coincer en dessous du bout de tissus qui recouvrait une partie de son crâne. Oui, elle appréciait Ablyss. Comme un grand-frère. Oui, comme un grand-frère, puisque c'était ce qu'il était. En quelque sorte. C'était son grand-frère... Leur relation n'avait pas toujours été au beau fixe: ils s'étaient rencontrés à Londres, en exerçant leurs doigts à la dure activité qu'était le vidage de poches. Au début, sa fierté en avait prit un coup, et elle s'était refusée à nouer quelque lien que ce soit avec cet énergumène. Elle voulait juste lui prouver à quel point elle pouvait être meilleure que lui, point à la ligne. Néanmoins, les choses changèrent par un matin que n'importe qui aurait put qualifier de ''beau'' mais que la demoiselle, elle, définissait de cauchemardesque. Elle s'en souviendrait longtemps de cette migraine qui avait faillit la rendre folle... Perdue dans la foule, elle ne s'en serait jamais sortie si Ablyss ne l'avait pas trouvé. Comme elle pouvait l'avoir bénit, en ce jour maudit. Ce jour où, elle, Noah de la Carence, s'était éveillée.

Ses pas s'arrêtèrent et un frisson lui parcourut l'échine. Le temps s'était quelque peu rafraichit, en même temps que le soleil avait commencé à se coucher. Et avec la chance qu'elle avait, elle n'avait pas la moindre veste... Et comme si le Ciel s'amusait de la voir frissonner, un vent frais vint soulever ses mèches blanches, colorant ses joues pâles d'un léger rose. Ses yeux se levèrent vers le ciel qui commençait à se couvrir. Il allait sans aucun doute pleuvoir. Elle connaissait cette place. Place Joachim-du-Bellay. Avec la fameuse fontaine des innocents. Cette Fontaine qui était réputée pour sa beauté... Anne ne comprenait vraiment pas ce que tous lui trouvaient. Ce n'était qu'une fontaine, certes richement décorée, mais c'était tout, rien de plus, rien de moins.
Elle se souvint des moments qu'elle avait passé sur cette place, à détrousser les passants sans qu'ils ne s'en aperçoivent et à rire avec l'ami qu'elle s'y était fait. Demon Cassidy. L'ombre d'un sourire éclaira son visage quand l'image du jeune homme s'imposa dans son esprit. Cela faisait quelques semaines qu'elle avait renoué les liens avec lui... Et elle n'avait qu'une envie: le revoir de nouveau. Elle se sentait tellement bien avec lui, son âme allégée de tout soucis et toute peur...

Ses sourcils se haussèrent légèrement, marquant la surprise de la demoiselle. Il y avait quelqu'un par terre, au pied de la fontaine. Plié en deux. Comme si la silhouette souffrait. Et pourtant... Aucun cri, aucun gémissement ne parvint à ses oreilles.

Anne fit quelques pas en avant, cachant son inquiétude derrière un masque impassible. Ses pas semblèrent étonnamment bruyant, résonnant sur le pavé de la place presque déserte. À une distance tout à fait respectable de la jeune fille, ils semblèrent hésitants, n'osant pas s'approcher d'avantage, craignant de faire un pas de trop, d'effrayer cette jeune fille aux allures si frêles. Un pas de plus et elle s'arrêta. La bouche un peu sèche, prenant son courage à deux mains et chassant ses doutes, elle entreprit de briser le silence. Sa voix se fit entendre. Elle n'était pas agréable à entendre. Trop rauque. Pas assez forte.

« Vous allez bien ? »
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Nami
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MessageSujet: Re: Éveil. Ended.   Éveil. Ended. Icon_minitimeLun 30 Avr - 1:31

Musique.

I think you can do much better than me
After all the lies that I made you believe
And guilt kicks in and I start to see
The edge of the bed where your nightgown used to be

I told myself I won't miss you
But I remembered what it feels like beside you

I really miss your hair in my face
And the way your innocence tastes
And I think you should know this
You deserve much better than me

Ses longs cheveux ébène glissaient entre ses doigts fins. Elle fixa ses genoux, les yeux à demi clos, juste assez ouverts pour voir la couleur du tissu qu’elle portait. Les images étaient persistantes ; elles restaient gravées dans sa tête. Tout était là ; sa sœur jumelle, la rose argentée des exorcistes, et les croix noires qui s’étaient tracées sur son front, alors qu’elle se croyait malade dans son lit, et que sa mère se moquait bien de son sort. Parfois, Meian s’imaginait enveloppée dans ses ombres ; dans ces cas là, elle était seule, tout était noir, tout était familier. Enfermée dans cette prison de pénombre, elle était en sécurité. Mais la réalité était trop rusée pour la perdre de vue. Même dans ce noir d’encre, elle restait là, impitoyable, suivant la gamine à la trace, comme un loup chassant sa proie. Meian savait que les monstres la pourchasseraient toujours. Alors elle décida de laisser ses images l’envahir. C’était sa punition, pour n’avoir pas sut sauver sa sœur. C’était le prix à payer. Mais surtout, plus important encore ; c’était la seule façon de faire persister sa sœur quelque part. La faire vivre dans ses songes, dans ses rêves… L’aimer jusqu’à son dernier souffle. Jusqu’à son dernier battement de paupière. Et même après. L’avoir dans ses dernières pensées. Et s’imaginer la rejoindre en voyageant loin du monde réel et cruel.

Que pouvait-elle faire de plus beau pour elle, après l’avoir haït tellement elle l’aimait ? Pour l’avoir haït d’être si indépendante et si abandonnée ? Que pouvait-elle faire si ce n’était se déchirer les poumons, crier son nom, reniant son incarnation ? Le silence. Les ombres. Deux symboles qui définissaient parfaitement cette Noah. Et pourtant, si seulement une personne avait daigné l’observer d’un peu plus près, peut-être aurait-on entendu ce tremblement, ce battement de cœur essoufflé. Peut-être l’aurait-on entendue crier en ce fameux jour, où la lumière s’était éteinte et où la lame l’avait transpercée. Et peut-être aurait-on vu cette lueur, cette si sombre lueur, mais un fantôme de lumière tout de même, qui palpitait tel un oisillon dans les yeux de la jeune fille. Ce soupçon d’espoir et d’amour qui ne l’avait jamais quitté. Mais maintenant, il était trop tard. Les yeux bleus de la Noah étaient ternes et creux. Son être entier était négligé, et si elle n’avait pas été immortelle, elle serait sûrement malade. Si ses capacités de régénération n’avaient pas empêché sa blessure de prendre le dessus d’elle, elle serait morte déjà. Sans-doute nul Noah n’avait ainsi fait honte à sa race. Mais elle était bien loin de penser aux conséquences. Personne ne pouvait la ressaisir. Personne ne pouvait la ramener sur le droit chemin. La chute avait été trop rude et elle ne marchait plus droit. Le choc avait été trop sourd et les morceaux fracassés étaient nombreux à ramasser. Trop nombreux peut-être pour y parvenir en toute une vie.

« Vous allez bien ? »


Meian ne sursauta pas, mais dévoila pourtant des yeux vaguement étonnés lorsqu’elle releva la tête. Des mèches sombres tombaient sur son visage, et elle se sentit soudainement petite, assise où elle était, abordée par une adolescente alors qu’elle venait de fissurer le sol même où elles se trouvaient. Peut-être était-ce cette part d’étonnement qui intrigua la demoiselle. Pendant un instant presque pesant, elle laissa ses yeux perçants couler sur la jeune inconnue. Des cheveux blancs, des yeux clairs. Et un air indifférent. N’avait-elle pas eut peur en voyant les bâtiments s’effondrer sous des secousses monstrueuses ? Ne voyait-elle pas les volutes de fumée qui s’envolaient encore dans le ciel, et les dessins frais qui décoraient les dalles sur lesquelles elle marchait ? En effet, Meian ne s’était absolument pas douté d’être ainsi visitée, après la scène qui s’était déroulée et dont elle avait été l’actrice principale. C’était sûrement pour cela qu’elle n’eut pas entendu l’inconnue s’approcher, tellement absorbée fut-elle par ses pensées.

Elle ne savait pas plus qu’il s’agissait d’une nouvelle sœur pour elle. Angel avait dû lui en parler, mais Meian avait plus ou moins réussit son détachement avec le reste de la famille, et était plutôt douée pour faire la sourde oreille. Ses pouvoirs, qui auraient pût faire d’elle une espionne parfaite, étaient inutiles avec son manque de curiosité et de devoir. Elle ne sut pas comment réagir avec cette inconnue. Auparavant, elle aurait accepté de parler avec une humaine si courageuse, ou si insouciante, mais la tournure des événements avait fait d’elle une catastrophe ambulante. Elle n’hésitait pas à lever la main sur ce qui l’entourait. Elle voulait faire souffrir, tout comme sa jumelle avait souffert. Sans doute était-ce égoïste, mais Meian tenait le monde entier responsable pour ce qu’on lui avait fait subir. C’était lui qui lui avait arraché ce qui était la chose la plus précieuse à ses yeux.

« Tu aurais du fuir avec les autres. »


Sa voix était un murmure, un peu rauque, lui aussi, et menaçant.
Ses longs cheveux toujours mêlés autour de son visage juvénile, elle s’aida d’une main pour se redresser. Sa robe aux couleurs bleutées était parsemée de poussière, que les fissures et les avalanches avaient envoyés jusqu’à elle. Soudainement, un frisson sembla animer le paysage qui les entourait. Il s’agissait de la pénombre qui tremblait d’impatience, alors que la Noah du Silence éveillait quelques ombres qui se déployèrent dans son dos, telles des ailes de corbeau. Meian fit un pas vers son interlocutrice. Elle ne cessait de fixer ses yeux, y cherchant elle ne savait quoi. A vrai dire, elle ne savait pas ce qu’elle faisait. Elle ne savait qu’une chose ; qu’elle pleurait, au plus profond d’elle. Elle pleurait le vide gigantesque qui était apparut dans sa vie. Et elle pleurait car sa colère faisait mal. Elle leva une main, et la grâce qui accompagna ce geste ne faisait que le rendre plus terrifiant, alors que les ailes suivaient ce mouvement, enveloppant les deux jeunes filles dans un sombre cocoon. Il fit nuit noire, en cet instant. Meian acheva de réduire la distance entre elles. Elle saisit le visage de l’inconnue entre ses deux paumes, avec délicatesse. Déjà des ombres s’enlaçaient autour des jambes de sa proie anonyme. Elle était prise au piège dans ses filets. Et sans doute aurait-elle dû mourir ce soir là, si la vie n’avait pas fait de son existence quelque chose de si compliqué. Car à présent, elle avait rejoint la guerre. Elle avait rejoint son camp, sans même le demander, probablement. Et par ce simple fait une ébauche de lien s’était tissé entre elle et Meian.

Cette dernière pouvait voir dans le noir. Mais plus encore ; elle pouvait ressentir. Les ombres frissonnèrent autour d’elle. On eut dit qu’elles se tenaient dans le ventre d’un monstre énorme. Une sensation bizarre se faisait ressentir dans sa tête, comme si quelque chose lui chatouillait l’esprit, mais elle ne savait pas de quoi il s’agissait. Elle observa sa proie plus longtemps, cherchant à voir au-delà des yeux clairs et profonds, de ce visage encadré de mèches blafardes. Finalement, la curiosité et l’étrange sensation eurent le dessus d’elle. Comme une enfant, prise par la peur de faire une bêtise, elle fit marche arrière. Pourtant elle n’avait pas peur. Une brèche fine permis à la lumière d’envahir le cocoon d’ombre, et de couler sur leurs visages, amincissants leurs pupilles et faisant ainsi jaillir des éclats de couleurs. Les mains de Meian retombèrent lentement, et elle fit un pas en arrière.

« … Qui es-tu ? » Souffla-t-elle.


Elle brûlait d’envie de le savoir, à présent. Les ombres étaient devenues immobiles. Elles se tenaient comme des murs autour d’elle, laissant néanmoins une fissure de lumière éclairer l’antre. On ne voyait plus rien, de l’extérieur, et les bruits étaient étouffés.

Si seulement elle avait pu protéger sa sœur de cette façon. La prendre dans ses bras un tout petit peu plutôt. Si seulement elle avait sut où l’amener, au lieu de venir se perdre aux portes de la Congrégation de l’Ombre. Si seulement elle avait sut comment faire pour que le sang cesse de couler. Si seulement elle avait sut comment donner sa vie, à la place. Elle avait beau haïr sa jumelle, ce n’était qu’un rideau brûlant recouvrant une scène d’amour indétrônable. Si seulement elle aurait put le dire à sa sœur. Lui dire à quel point elle tenait à elle. Et ne pas crier dans le vide, dans l’absence, délaissée, comme elle l’avait fait, avant de frôler la mort, lorsque l’exorciste été arrivé. Si seulement. Si seulement son coup avait été un peu plus fort, elle l'aurait accompagné.

Si seulement.


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MessageSujet: Re: Éveil. Ended.   Éveil. Ended. Icon_minitimeLun 30 Avr - 1:31

I think I'm drowning,
Asphyxiated,
I wanna break the spell that you've created,
You're something beautiful,
A contradiction,
I wanna play the game,
I want the friction.


Elle ne savait pas ce qu'elle faisait là. Pourquoi avait-elle adressé la parole à cette jeune fille ? En temps normal, elle lui aurait juste accordé un regard... Et encore. Mais jamais, Ô grand jamais, elle ne se serait arrêtée afin de vérifier que tout allait bien. Après tout, la jeune fille aux longs cheveux bruns respirait encore, elle était toujours vivante. Et pourtant, elle était là. Elle ne bougeait pas, et attendait une réponse quelconque à sa question. Question inutile, il fallait le dire, puisque cela se voyait clairement que la brune ne se sentait pas bien. Sinon, qu'aurait-elle fait à terre ? Ce n'était sans doute pas par plaisir. Anne ne put réprimer un vague soupir. Son regard gris, toujours fixé sur la frêle silhouette, n'était qu'indifférence. Ses mèches blanches tombaient devant ses yeux, lui obstruant quelque peu la vue. Cependant, elle ne fit rien pour repousser les gêneuses. Elle s'en fichait. Elle ne voyait qu'à moitié ce qui l'entourait, et c'était largement suffisant. Ses yeux, comme lassés de contempler la brune, se mirent à détailler le décor qui l'entourait. Elle n'arrivait pas à comprendre. Pourquoi ces bâtiments s'étaient-ils écroulés ? Qu'elles étaient ces formes étranges qui dansaient sur le pavé irrégulier ? Que s'était-il passé ici ? Une idée qu'elle jugea ridicule lui effleura l'esprit. Cette jeune fille, aux longs cheveux noirs, ne pouvait être la responsable d'un tel dérangement. C'était tout bonnement impossible. À moins que... À moins qu'elle ne soit ''comme elle'', ou qu'elle ne soit un de ces exorcistes ! À cette pensée, son corps se crispa. Elle n'en avait encore jamais rencontré, et n'avait pas envie de croiser la route de l'une de ces personnes. Elle ne les aimait pas. Elle en avait peur. Et ce, même si on avait fait que lui expliquer ce qu'était ''réellement'' ces élus, ces êtres choisis par l'Innocence. Un frisson dégouté lui parcourut l'échine. Non. Vraiment, elle ne voulait vraiment pas avoir à faire avec l'un d'eux. Son regard gris s'était fait dur, brillant de méfiance. La demoiselle Brandford était vraiment complètement déconnectée de la réalité. Comment avait-elle fait pour ne pas voir tout cela avant ? Avant de croiser le regard de la brune, elle n'avait vu la place que comme dans le souvenir qu'elle en avait conservé. Elle n'avait pas voulut voir les changements qui avaient pus se produire en ces lieux, préférant rester prisonnière de ses souvenirs. Et quels doux souvenirs... Des éclats de rire. Du soleil. Rien de négatif. Pas la moindre trace de doute dans le cœur de la jeune fille, juste l'insouciance propre aux enfants. Mais maintenant, tout cela avait disparut. À jamais. Elle n'avait plus aucune raison de se réjouir d'être ici, elle n'avait plus aucune raison de sourire, de rire, de pleurer. Alors que faisait-elle ici ? Qu'attendait-elle de la part de cette jeune fille, aux longs cheveux ébènes et emmêlés ? Rien. Absolument rien.

« Tu aurais du fuir avec les autres. »


Sous sa frange, les yeux d'Anne s'écarquillèrent. Oui, elle le savait, qu'elle n'aurait pas du s'attarder en ces lieux, et pourtant ses pieds n'avaient pas bougé d'un millimètre, ne réalisant pas vraiment la triste scène qui se jouait autour d'elle. Son corps avait perçut les secousses, mais cela n'avait pas été suffisant pour qu'elle prenne pied dans cette réalité. Seule la voix de son interlocutrice l'avait fait redescendre sur terre. Bien que cela ne soit qu'un murmure, la Noah de la Carence n'avait eu aucun mal à entendre les mots qui avaient été prononcés. Étrangement menaçants, aussi.
Oui. Elle aurait du fuir. Faire demi-tour et s'en aller loin de cette place qu'elle avait tant aimé et qui avait vu de nombreuses fois la demoiselle alors qu'elle n'était qu'une enfant. Mais elle ne l'avait pas fait. La voilà, faisant face à cette inconnue à la robe poussiéreuse, qui se rapprochait dangereusement. Elle était vraiment près... Beaucoup trop même, selon la blandinette, qui, bientôt, ne vit presque plus rien. Des ombres venaient de se refermer autour des deux silhouettes. L'une semblait plutôt calme, alors que l'autre commençait à s'agiter. Son cœur battait dans sa poitrine, lui rappelant à sa présence à chaque fois qu'il heurtait douloureusement ses côtes. Son regard, où brillait une lueur inquiète, ne quittait pas cette main qui était apparue devant elle. Son souffle se faisait irrégulier, sous l'effet de la peur qui commençait à l'envahir, et ce, bien malgré elle. Elle n'aimait pas ces ombres qui dansaient autour d'elles. Effrayantes et menaçantes. Ses peurs d'enfant se réveillèrent, embrouillant son esprit avec mille et une questions qu'elle ne parvenait pas à formuler. Prise au piège. Elle était prise au piège.

Par pur réflexe, elle tenta de faire un pas en arrière, en vain. Quelque chose l'en empêchait. Elle ne savait pas ce que c'était et, quand elle voulut baisser la tête pour voir ce qui bloquait ses jambes, deux mains se posèrent sur ses joues, avec une douceur inquiétante, l'obligeant à garder son regard rivé droit devant elle, sur ce qui devait être le visage de l'autre jeune fille. Elle le devinait plus qu'elle ne le voyait, l'épais rideau sombre empêchant toute forme de lumière de les éclairer. Elle devinait ses pupilles bleues. Elle devinait les mèches brunes tombant sur son visage fin et harmonieux.
Anne entr'ouvrit la bouche, dans l'espoir de s'exprimer, de lui dire de la lâcher. En vain. Ses lèvres étaient beaucoup trop sèches et les mots refusaient de sortir. Les traîtres. Ce n'était pas la première fois qu'ils l'abandonnaient, loin de là même. À chaque fois qu'elle était impressionnée, inquiète ou même effrayée, ces derniers prenaient la fuite, la laissant là, dans le désarroi le plus total. Gênée et à la fois agacée par cette drôle de réaction, la blanche se mordit brusquement la lèvre inférieure, déchirant la chair et laissant couler une fine goutte de liquide carmin jusqu'à son menton.

Puis, tout aussi soudainement qu'elle s'était retrouvée coincée, la lumière se fraya un chemin à travers la coque qui entourait les deux jeunes filles, rassurant quelque peu la jeune anglaise. Elle ne s'attendait pas à cela … Quelle mouche avait donc piqué l'autre Noah ? Ne laissant rien paraître de sa surprise, la demoiselle n'esquissa pas le moindre geste, même quand son visage fut libéré de l'emprise de la brune. Seul un soupir de soulagement lui échappa. Même si les remparts étaient toujours là, le fait que son interlocutrice se soit éloignée lui permettait de souffler un peu.

« … Qui es-tu ? »


Anne détourna le regard. Qui était-elle ? Bonne question. Elle était juste Anne Eléonore Brandford, une anglaise de dix-sept ans. Une jeune fille sans ambition, qui se contentait de faire ce qu'on lui demandait, qui n'agissait que rarement de son plein gré. Elle n'aimait rien de particulier, ne faisait rien de son temps-libre si ce n'était d'errer comme une âme en peine dans les lieux qui flottaient dans ses souvenirs, qui avaient bercé son enfance. C'était ainsi qu'elle se représentait. Il était triste de voir le peu d'estime qu'elle pouvait avoir pour sa propre personne, qui ne se résumait pas qu'à cela, car elle était aussi Anne, Noah de la Carence. Chose qu'elle avait encore un peu de mal à réaliser...

Lentement, sa main va se poser sur le bas de son visage, légèrement taché par le sang qui s'était échappé de sa lèvre. Son regard gris prit une très légère teinte dorée, alors que sa peau s'assombrissait progressivement, de drôles de stigmates se dessinant sous sa frange immaculée. Oui, elle était Anne. Anne, qui avait hérité de la Carence de Noé. L'ombre d'un sourire étira ses lèvres, toujours cachées par ses doigts fins et pâles. Qu'est ce qui la gênait, dans ce fait là ? Qu'est ce qui l'empêchait de s'accepter telle qu'elle était ? Rien... Ce n'était qu'elle qui réfléchissait trop, qui voyait des problèmes où il n'y en avait pas, qui se torturait l'esprit pour un rien.

« Anne... mumura-t-elle derrière sa main. Je suis Anne... »


Qu'il fasse noir ou non ne lui importait plus. Elle ne sentait plus vraiment ses jambes et ignorait si elle pouvait de nouveau se mouvoir comme elle le voulait. Elle avait juste envie de discuter un peu plus avec cette drôle de fille, ses peurs ayant brusquement disparues. Elle ne savait plus vraiment ce qu'elle faisait, comme si elle n'était plus vraiment elle-même. Un coup noir, un coup blanc... Cela lui arrivait de temps à autre, depuis quelques temps... Elle avait finit par s'y habituer, à ses satanés changements d'humeur, mais cela ne voulait pas dire qu'elle les appréciait pour autant... D'un mouvement mécanique, la miss passa une main parmi ses mèches aussi blanches que la neige. Elle était un peu perdue … Mais bon, ce n'était pas le moment de s'attarder sur ce genre de ''choses''.

Sa main retomba le long de son corps, dévoilant son presque sourire et froissant légèrement le tissus bleu de sa robe. Ses yeux se posèrent de nouveau sur l'autre adolescente, l'air absent. Aucun son ne parvenait jusqu'à ses oreilles, si ce n'était celui de sa propre respiration, discrète et régulière. L'air plus sûre d'elle, elle ouvrit la parole d'une voix qui se voulait assurée et forte, son regard toujours rivé sur son interlocutrice, cachant derrière cette fausse désinvolture toutes ses faiblesses.

« Et... A qui ai-je l'honneur ? »


You can't push it underground
You can't stop it screaming out
How did it come to this ?
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MessageSujet: Re: Éveil. Ended.   Éveil. Ended. Icon_minitimeLun 30 Avr - 1:31

I had a dream my life would be so different from this hell I’m living.

« Anne… Je suis Anne. »

Le dorée des yeux de son interlocutrice sembla attirer toute la lumière qui s’infiltrait dans le monde noir de Meian. C’est avec des yeux faussement curieux qu’elle observa les stigmates se dessiner progressivement sur le front de la jeune fille aux cheveux blancs. Plus intenses que sur sa propre peau, pâle, les croix se contrastaient avec la silhouette entière de cette étrange Noah. Étrange, vraiment ? Ou était-ce l’impression que Meian avait, à force de se désintéresser de tous et de l’observer, elle, brusquement, soudainement ? Elle voulut détourner le regard. Ces stigmates étaient également sa couronne, la retenant dans ce monde qui lui avait autrefois semblé si irrationnel. Mais la vérité avait frappé, et bien qu’elle avait survécut à la déchirure de son cœur lorsque le dernier pont entre elle et sa jumelle s’était écroulé, c’était seulement car l’espoir de trouver une passerelle clandestine avait toujours subsisté dans son esprit encore vaguement positif. Ce qui la retenait vaguement en vie, à présent que tout espoir était fané, c’était cette maladie obscène, cette immortalité qui persistait même lorsqu’elle était non désirée. Mais si la mort s’était échappée, elle savait que la souffrance corporelle n’était pas entièrement proscrite à leur race. L’innocence avait ce pouvoir. Car l’innocence pouvait détruire, blesser, enrager. C’était elle la suprême coupable. Celle qui avait pris sa sœur. Celle qui l’avait enfermée dans sa chambre, à sangloter sous le regard désespéré de sa mère très peu compatissante. Celle qui l’avait rendue malade, malade à en crever, à perdre toute part d’humanité sous sa colère et sa haine. À la réduire au silence le plus extrême. À rendre cette haine et ce mutisme éternels. C’était l’innocence qui avait transpercé son ventre, la blessant comme jamais un objet ne l’avait blessée, aussi mortel fut le coup. Non, l’innocence était là pour la détruire. C’était certain. Sa cicatrice, son unique cicatrice, immonde et douloureuse, n’était que le rappel d’une chose qu’elle savait pertinemment. Elle qui s’était toujours montrée compréhensive et compatissante envers le monde et les malheureux hommes, ne vouait plus qu’une haine à présent. Et son unique quête à présent était de venger sa sœur. Et déjà avait-elle une idée bien précise dans sa tête. Une envie de vengeance qui brûlait comme une flamme, se consumant dans son ventre où la douleur chatouillait sa peau. Et si elle n’avait pas encore abdiquée à cette émotion dominatrice, c’était parce qu’elle se souvenait de la disparition de sa sœur, qui s’était effacé comme un jeu de lumière, comme une lueur qui se perdait dans le crépuscule. Et ce geste était trop brusque, trop irréel, trop soudain, pour qu’il ne vienne à terme de ses espoirs fatigués mais vivants, balbutiant comme des oisillons déplumés. Alors elle se condamnait à chercher, partout, dans chaque recoin, l’ombre familière de sa sœur. Mais chaque pas de plus se faisait pesant. Et si autrefois elle s’était soulevée seule dans ce monde sans pitié, elle avait maintenant appris à lever la tête vers quelques êtres qu’elle ne savait comment considérer. Elle n’avait jamais voulu parler. Elle n’avait jamais voulu se lier d’amitié. Mais Angel l’avait pêchée dans sa torpeur. Nemesis, lui, l’avait suit comme une ombre qu’elle ne pouvait contrôler, et lui avait volé bien des secrets. C’est ainsi qu’elle s’était vue prise entre haine et amour pour un être encore une fois étrange, et qu’elle ne s’en rendait même pas compte encore.

Aux prochaines paroles d’Anne, elle releva ses pupilles bleutées qui s’étaient perdues. Elle répondit au demi-sourire de la Noah par un frêle sourire qui lui rendait toute son innocence de gamine. A qui avait-elle honneur ? Quelle politesse. Que pouvait-elle lui répondre ? Son prénom ? Son souvenir ? Trois mots pour définir ce qu’elle était ? Haine, amour, silence. Non, bien sûr que non. Jamais ces mots ne la définiront, et jamais ne se définirait-elle à qui que ce soit. Si elle avait accepté l’intrusion du Comte, et l’intrusion de Nemesis, c’était déjà de trop. Le silence. Elle le garderait. Elle garderait le silence sur tout, sauf son prénom.

« Meian. »

Elle prononça chaque syllabe avec un goût amer dans la bouche. Les ombres qui les entouraient toujours frémirent. Lentement, silencieusement, elles se replièrent sur elles-mêmes, avant de s’éclipser sur le bitume. Une fois encore, l’eau claire de la fontaine était visible. Une fois encore, le manque d’animation était omniscient autour d’elle. À nouveau éclairée, Meian se retourna, tournant le dos à son interlocutrice. En quelques pas, elle grava les marches qui précédaient la fontaine. Elle posa ses mains sur le rebord fissuré, et contempla l’eau, qui avait cessé de s’agiter exagérément, maintenant. Son sourire avait disparu, et c’est de manière sarcastique que les prochains mots fusèrent.

« Bienvenue dans la famille, alors, ma chère… sœur. »

Son ton était effrayant. Elle observa Anne avec insistance. Pas douée pour les relations ? Certes, c’était le cas, mais plus encore depuis qu’elle avait tout rejeté, que ça soit son humanité ou son être tout entier. Elle n’aimait pas vraiment considérer les autres Noah comme une famille. Elle n’avait qu’une sœur, et elle n’avait pas de frère. Et à chaque fois qu’elle usait de ce titre envers quelqu’un d’autre que sa véritable jumelle, le mot était prononcé avec mépris et avec une dénonciation que nul ne pouvait comprendre sans en savoir un minimum sur elle. Qu’ils soient dépourvus, puisqu’ils étaient tous insouciants du mal qu’ils pouvaient bien commettre, rien qu’en existant.

Meian dépoussiéra distraitement sa robe d’un revers de sa main. Elle rejeta ses cheveux de nuit dans son dos où il ne la gênerait pas. Ses petits pieds furent sur le bord de la fontaine, et ses bras maintinrent inutilement sa balance, s’étendant de chaque côté de son corps. Elle courbait le cou pour ne pas toucher l’arche qui se situait au-dessus d’elle. Elle frôla l’eau de la pointe de son pied, y formant des petites ondes éphémères.

« Ou peut-être, bienvenue en enfer. »

Elle chantonna un instant, quelques notes de musique sans parole. Perdue au bord de ce petit trou d’eau insignifiant. Mais il y avait Anne à côté d’elle. Elle finit par retourner sur le sol, et s’approcha de la nouvelle noah, comme fascinée. Elle était un parfait contraste avec elle. Ses cheveux courts et blancs, et ses cheveux longs et noirs. Elle fit quelques pas, comme si elle dansait sur les pavés fissurés. Puis sa voix, étrangement semblable à celle d’une gamine, brisa le silence.

« M’accompagnerais-tu sur la tour ? »

La tour Eiffel, bien sûr. C’était tellement cliché, mais pour tout dire, elle n’était jamais allé dessus. Et qui sait, peut-être tomberaient-elles sur quelque chose d’intéressant.
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MessageSujet: Re: Éveil. Ended.   Éveil. Ended. Icon_minitimeLun 30 Avr - 1:32


« Meian. »répéta-t-elle pensivement dans sa barbe inexistante.


Simple murmure, répondant à la question qu'elle avait posé quelques secondes plus tôt. Frémissantes, les ombres de la dénommée Meian se retirent, laissant les deux silhouettes face à face, disparaissant comme si elles n'avaient jamais existé, comme si leur présence n'avait été que le fruit de l'imagination pourtant peu fertile d'Anne. Mais cette dernière savait bien que ce n'était pas un rêve, que même si ces derniers temps, elle avait du mal à faire la différence entre ce qui était réel et ce qui ne l'était pas: la scène qui s'était jouée sous ses pupilles maintenant dorées n'était pas un mauvais tour de la part de son esprit tordu. Les fissures déchirant les pavés en étaient la preuve. Son regard toujours ancré sur la silhouette de son interlocutrice, elle la regarda lui tourner le dos, ses lèvres scellées. Meian. C'était donc son nom. Bizarre, ne put-elle s'empêcher de songer. Bizarre mais joli. Court, mais chantant, selon elle. Cela aurait put être le nom d'une fleur. Une fleur sauvage, avec des épines afin qu'on ne la cueille pas. Étrange et futile réflexion que la demoiselle se faisait là, mais c'est la seule chose à laquelle elle avait bien voulut pensé en entendant ce nom, prononcé avec amertume. Méprisait-elle ce nom qui était pourtant le sien ? Pourquoi tant d'amertume ? Anne n'en savait rien, et n'était pas certaine de vouloir le savoir. À quoi cela lui servirait-il de savoir cela ? À l'aider ? Elle qui était incapable de marcher sans qu'on la tienne par la main, elle qui avait peur de tout et de rien en même temps ? Et puis, qu'est ce qui lui disait qu'elle avait besoin d'aide ? Peut-être que Meian pouvait très bien se débrouiller seule...
Un pas en arrière, puis un second. Voilà tout ce qu'accepta de faire le corps de la jeune anglaise. Pas qu'elle ait été terrifiée par cette drôle de démonstration, mais elle avait été fortement surprise. Du moins, c'était ce dont elle essayait de se persuader. Elle n'avait ressentit aucune peur, et ce qui avait fait battre son cœur si vite tout à l'heure n'était que l'étonnement. N'est ce pas ? Cela faisait bien longtemps que la peur n'avait pas eu d'emprise sur elle, car elle avait déjà, selon elle, tout perdu. Alors que pouvait-elle bien craindre maintenant ? La mort ? Oh, elle n'en avait pas peur, de la Dame armée de son éternelle Faux. Elle ne la craignait pas, et attendait patiemment le jour où elle devra s'abandonner à elle. Jour qui ne viendra probablement jamais.

Voilà ce qu'elle aurait put répondre, drapée dans le peu de fierté qui lui restait, la tête haute, les yeux rivés sur le ciel, imaginant avec une pointe d'envie ce à quoi ressemblait l'Au-Delà, ce Paradis auquel tant des gens aspiraient à rejoindre, ou cet Enfer qui en faisant frémir plus d'un. Elle qui prétendait être déçue par ce monde qu'elle croyait par connaître cœur, et qu'elle blâmait silencieusement, le prenant pour l'auteur de tous ses maux, alors qu'elle en était la seule responsable. Elle seule avait fuit les autres, s'enfermant volontairement dans une cage, pour se protéger du monde. Et elle avait lamentablement échoué. Tout ça à cause de lui. C'était uniquement sa faute. Néanmoins, elle ne lui en voulait pas, bien au contraire. Elle n'arrivait pas à lui en vouloir de toute façon. Et la seule chose qui l'effrayait présentement était qu'il la laisse seule, qu'il l'abandonne, de ne plus le revoir, qu'il l'oublie. Tout un tas de peur que l'on pouvait qualifier de puériles, inutiles.

Alors, non. Elle n'avait pas eu peur, elle avait juste été surprise. Pas de ces ombres bonnes à effrayer les enfants.

Non, ce qui lui arracha un frisson trahissant son malaise fut la voix glaciale et tranchante de l'autre Noah, qui lui souhaitait la bienvenue dans la famille. A l'entendre, on percevait tout de suite l'ironie de ce ''bienvenue''. Non, elle n'était pas la bienvenue dans cette famille, du moins aux yeux de Meian...
Anne ne pouvait s'empêcher de se demander ce qu'elle faisait encore ici, avec cette autre Noah qui ne semblait pas apprécier sa présence. Présence qu'elle ne semblait pas détester non plus, seulement, elle avait juste l'air de s'en ficher, ce qui était tout de même quelque peu vexant. Néanmoins, elle ne bougea pas d'un pouce, se contentant de l'observer épousseter sa robe, repousser ses longs cheveux noirs dans son dos, puis, telle une enfant, faire le tour sur le rebord de la fontaine. En la regardant faire, l'incarnation de la Carence ressentit une certaine mélancolie, se souvenant qu'elle faisait ça elle aussi, quand elle habitait encore en France, quelques années auparavant. Ça lui faisait mal d'y repenser, mais c'était plus fort qu'elle. Baissant la tête, elle contempla quelques secondes le bout de ses bottines, avant que son interlocutrice ne reprenne la parole, évoquant vaguement l'Enfer, l'assimilant à sa nature de Noah. Pour toute réponse, la demoiselle aux cheveux blancs se contenta de détourner le regard, en haussant distraitement les épaules. L'Enfer, elle connaissait déjà. Elle avait créé le sien, s'était emmuré dedans, dans son silence, dans sa solitude. Alors cet Enfer dont Meian lui parlait, elle n'en avait pas peur. Elle était même curieuse de savoir à quoi il ressemblait, s'il était aussi terrible que le sien.

L'écoutant chantonner d'une oreille distraite, l'anglaise fût quelque peu surprise quand la brune lui proposa de l'accompagner ''sur la tour'', si elle reprenait ses dires. Pourquoi pas ? La demoiselle aux cheveux blancs n'avait jamais eu l'occasion d'aller au sommet de cette tour qui déchainait les critiques, alors maintenant qu'on lui proposait, elle n'allait pas refuser. Ancrant son regard gris dans les pupilles plus sombres de son homologue, la jeune fille tenta de se composer un masque plus joyeux, voulant se donner un air plus vivant que celui qu'elle arborait habituellement, en vain. Son visage ne parvint qu'à se crisper en une sorte de grimace, qui ne convenait guère à la situation. Laissant rapidement tomber sa tentative de sourire, l'adolescente se contenta de contourner la silhouette de Meian, face à elle, et de lâcher sèchement:

« Avec plaisir. »


A l'entendre, on aurait put croire le contraire, alors qu'il n'en était rien. Se rendre au sommet de l'immense bâtisse en métal la réjouissait, vraiment. Seulement, cela faisait bien longtemps qu'elle ne souriait plus, qu'elle ne trépignait plus d'impatience comme l'enfant qu'elle avait un jour été.
Donc sans plus attendre, la blandinette se mit en marche en direction de ladite tour dont le sommet se dessinait au dessus des toits. Devinant sans mal que son interlocutrice la suivait, elle avançait d'un pas rapide et sûr, connaissant presque par coeur le dédale des rues françaises, pour y avoir jouer une partie de son enfance. Faisant bien attention à ne pas trébucher sur le pavé endommagé, la demoiselle quitta la place sans un regard en arrière, s'engouffrant dans une rue plus que déserte. Pas le moindre signe de vie... Tan pis,ce n'était pas non plus comme si elle s'en souciait réellement. Le bruit de ses pas résonnait de façon régulière sur le sol irrégulier des ruelles qu'elle traversait, concentrée sur l'itinéraire à emprunter afin d'arriver à destination. Elle était tellement plongée dans ses pensées qu'elle ne remarqua pas tout de suite que les rues commençaient à gagner en population, ni n'entendit Meian si cette dernière lui avait adressé la parole.

Une fois arrivées à destination, la blanche poussa un soupir de soulagement en constatant que son sens de l'orientation n'était pas aussi déplorable qu'elle pouvait le croire.

« Bien...Nous y voilà... »


Fixant le haut de la tour, la demoiselle eut quelque peu le tournis, et prononça ces mots assez distraitement. Elle cligna deux trois fois des yeux, avant de secouer vivement la tête, histoire d'oublier cette désagréable impression de chuter qu'elle avait eu en contemplant le ciel bleu. Elle passa rapidement avant de passer une main parmi ses cheveux neigeux. Après avoir jeté un rapide coup d'oeil à celle qui l'accompagnait, puis, sûre d'elle, se dirigea vers les escaliers qui devaient mener tout en haut, croyant qu'il serait aisé de les gravir. Ce n'était que des escaliers après tout !

La belle erreur.

Au bout d'une centaine de marches, Anne crut qu'elle n'arriverait jamais à monter toutes ces marches tant le souffle lui manquait. Et comme si cela ne suffisait pas, ses jambes lui paraissait incroyablement lourde, comme si des poids avaient été accrochés à ses chevilles. La belle affaire... Cependant, elle n'abandonna pas et, avec beaucoup de mal, arriva enfin à la destination finale, au sommet de la tour. D'abord pliée en deux, prenant appui sur ses genoux pour reprendre son souffle, elle se redressa ensuite souplement pour s'approcher de la rambarde, désireuse de voir Paris d'en haut. La réaction ne se fit pas attendre. Son visage, déjà pâle, blêmit encore un peu plus, tandis que le reste de son corps se crispait, comme tétanisé. Un goût de fer avait prit possession de sa bouche et sa tête commençait à lui tourner, signe qu'elle ferait mieux de reculer d'un pas. Voire même plus. Ce qu'elle fit sans plus attendre, sentant son malaise s'accroître de seconde en seconde. Bon sang... Elle avait le vertige... Et elle venait de le découvrir, au sommet du grand monument en fer qui surplombait Paris. Gé-ni-al.
Plus que tendue, Anne chercha du regard sa ''soeur'', sans la voir. Ses sourcils se froncèrent: où était-elle passée ? Elle était pourtant certaine qu'elle n'était pas loin...


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MessageSujet: Re: Éveil. Ended.   Éveil. Ended. Icon_minitimeLun 30 Avr - 1:32

"Et l’Infini terrible effara ton œil bleu !"
Arthur Rimbaud.


[Music]

And it's too hard to talk about it
Too wild to analyze
She's living in my head now
And it surely makes me sad

Last night I woke up and I felt alone
There's some piece of my heart that's gone
I say I am a homeless man
Your shadow left my side

Elle était vêtue du silence. C’était une robe incolore et longue, qui glissait sur le sol en une caresse muette. Elle enfermait son corps dans son tissu étouffant, enfermant ses poumons et son cœur dans son cocoon hermétique, comme dans une salle grise et triste, vaguement moite, sans couleur, où les bruits se faisaient échos, ricochant entre les murs, renversant tout sur leurs passages, y compris eux-même. Elle était vêtue de ce silence, qui l’enveloppait presque jalousement, égoïstement, faisant d’elle sa marionnette. Une triste marionnette au fil solitaire. Et peut-être un jour scellerait-il ses lèvres également. Peut-être un jour serait-elle plus égale encore aux ombres qu’elle guidait du bout de ses doigts. Et peut-être que cette main qui guiderait tout ne serait plus la sienne. Elle avait était dotée de ce pouvoir, de cette immortalité. Elle avait survécut grâce à ça. Elle avait détruit, fracturé, fissuré. Elle avait fait tant de chose.

Et pourtant sa vie avait été si brève.
L’immortelle porta ses mains jusqu’à son torse, observant, muette, les tristes rues dans lesquelles elles marchaient. Il n’y avait personne. Elle eut presque le tact de se demander pourquoi. Mais n’était-ce pas elle qui avait chamboulé jusqu’à la terre, pour être seule, totalement seule, sans avoir à entendre la moindre once d’agitation humaine ? Elle avait plutôt réussit, puisque Paris était loin d’être une ville calme et tranquille, en temps normal. Car oui, elles étaient seules. Elles ? Son regard bleuté s’envola pour se poser sur le dos de celle qui la guidait. Finalement, elle était accompagnée. Et elle ne rejetait pas cette présence. Peut-être était-ce parce qu’elle ne pouvait subsister qu’avec ceux qui ne la fuyaient pas ? Le Comte, Nemesis, Angel. S’ils étaient tous des individus avec qui Meian s’entendait, c’était bien parce qu’ils avaient persisté à être proche d’elle d’une manière ou d’une autre. Et au fond, cela lui faisait un peu peur. Elle n’avait de place dans son cœur que pour sa sœur, sa jumelle. Jamais ne s’était-elle imaginé qu’elle se rapprocherait d’un nouvel individu dans ce monde qui l’avait happée, ce monde aux dieux peu miséricordieux. Sa sœur était tout. Sa jumelle était le côté clair de sa pensée, le fil conducteur de ses idées, la moitié de cœur qui lui avait été arraché. Elle était cette lumière trompée, fanée, éteinte, qui avait autrefois illuminé ses nuits les plus sombres. Mais tout n’était que ténèbres maintenant. Et Meian aurait pu se terrer à jamais dans ces ombres, en devenir une elle-même, devenir un monstre de la nuit. Devenir muette, aveugle, sourde, morte. Mais l’envie de vengeance était trop forte, la haine trop vive, la tristesse trop écœurante. Elle ne pouvait pas ne rien faire. Elle ne pouvait pas vivre sans elle, à vrai dire. Qu’est-ce qui la retenait, exactement ? Peut-être s’attendait-elle à la voir réapparaître, comme un effet d’optique, comme un soleil levant, prévenant le monde de sa venue par un doux rayon. Peut-être réapparaîtrait-elle aussi subitement qu’elle était partie, sans tromper l’œil. Après tout, Meian l’avait-elle vu rendre le dernier souffle ? Non. Elle s’était envolée comme un papillon aux ailes froissées, emporté par le vent. Comme une étoile de mer, qui se fait emporter par les blanches vagues à l’écume léchant. Et l’espoir rongeait le cœur de Meian. Car elle en avait toujours été le sujet. L’espoir, c’était ce qui l’avait tenue en vie depuis tout ce temps. L’espoir, c’était cette mort lente, inepte, et inespérée, qui gémissait derrière la porte de sa raison, et dont le souffle improbe mesurait le temps, tel le minuteur d’une bombe amorcée.

Et le temps passait.
Impitoyable.
Tellement dégueulasse.
Les heures se fondaient avec les jours, les secondes, les minutes.
Tout n’était qu’une masse confuse, et à ses yeux ; tout n’était qu’une absence ressentie.

Elle s’arrêta, portant ses mains à son visage et appuyant ses paumes contre ses yeux avec tellement de force qu’elle s’en créa des marques éphémères. Combien de temps pourrait-elle attendre ? Combien de temps pouvait-elle espérer ? Était-elle égoïste de vouloir ne serait-ce qu’une fois, RIEN qu’une fois, la prendre dans ses bras, la serrer bien fort, tellement fort, elle qui autrefois lui saisissait toujours la main, et lui faire comprendre, même dans son silence parfait, qu’elle vivait pour elle ? Qu’elle lui manquait ? Était-elle si égoïste ? Le monde la punissait-elle ? Doucement, elle abaissa ses mains, et la lumière crépusculaire étrécit ses pupilles. À partir de ce moment là, elle garda des yeux las. Tellement las. Et voyant le dos d’Anne qui s’éloignait, l’ombre à ses pieds s’enroula autour d’elle comme une aile, et elle disparut comme dans un élan trop rapide, pour réapparaître, comme si de rien n’était, quelques pas derrière la Carence. Si silencieuse, si imperceptible, qu’elle ne se fit pas remarquer.

Et elles étaient déjà arrivées.

Meian leva la tête vers le ciel, observant la pointe de ce monument métallique, rougi par les dernières lueurs du ciel comme si le fer était brûlant. Et pourtant c’était un monument austère, aux allures froides, squelettique, un monstre d’entrailles immobiles. Elles s’approchèrent jusqu’à se qu’elles ne soient que des insectes faufilés sous sa masse, le menton vers le firmament, observant les premières étoiles à travers l’ossature curieuse qui joignait les différentes plate-formes, ou alors fixant les plaques massives de métal qui tenait sur des pattes d’acier. Meian n’était pourtant pas impressionnée. Rien ne pouvait l’éloigner du jugement indétrônable qui s’était doucement et sûrement installé dans son esprit ; rien de tout ça n’avait de l’importance. C’était futile, c’était sale. C’était humain. Ça appartenait à un monde qui n’avait pas accepté ce qui l’unissait à sa sœur. À un monde qui n’inspirait pas le bonheur. Elle fermait les yeux à la vu d’un sourire. Elle bouchait ses oreilles lorsque les oiseaux se mettaient à chanter. Elle ne respirait plus lorsque le vent faisait valser les fleurs. Elle ne voulait plus croire aux illusions, au semblant de bien qui n’était qu’un anesthésiant qui piquait la peau, masquant la douleur les plaies. Elle ne pouvait simplement pas croire que ce monde était bien, car comment aurait-il pu l’être s’il n’acceptait pas sa sœur ? Comment aurait-il pu l’être en la faisant disparaître si promptement, sans crier, sans pleurer son absence ?

Elles entamèrent l’ascension. Les marches défilaient sous leurs pieds, et elles semblaient ne jamais prendre fin. Et pourtant elles se succédaient rapidement aux yeux de Meian. Elle grimpa, escalada, marcha, et concentrée sur sa tête, fut perdue dans des pensées plus calmes. Lorsqu’elle s’attardait, traînait, ses ombres ne tardaient pas à réduire la distance entre sa figure et celle de la Carence. Elle était elle-même une créature des ombres, aux pensées curieusement retournées, à la haine palpable et à l’amour enseveli. Au regard ombreux, à la gorge nouée. À cette vision unique et ces réactions violentes. Puis vint le dernier étage de la tour. Un vent joueur vint caresser les deux jeunes filles, les entraînant dans sa valse, tourbillonnant autour d’elles et soulevant les mèches blanches et noires de leurs cheveux. Elles étaient arrivées ensemble, toutes les deux. Pour n’y faire rien. Dans aucun but. Sans aucune raison. Elles y étaient parvenues.

Le Silence ne tarda pas à vouloir sentir le vertige. Elle s’approcha des barres métalliques qui la séparaient du vide, attrapant la première de ses mains, et passant sa tête par-dessus, ses longs cheveux noirs glissants de ses épaules pour s’y verser comme l’or noir jaillissant de la terre. Son regard chancela un instant, comme si soudainement, on eut dit que ses yeux étaient deux puits d’eau prêt à se verser dans le néant. Il chancela, brisant l’espace d’une seconde l’ankylose dans lequel il était tombé. Manifestant sa lassitude, et une étrange quiétude qui semblait tellement dangereuse à présent. Et pourtant elle se mit à sourire. Un demi sourire indifférent, imprimé dans le coin de ses lèvres rosées, vaguement ironique, et doux. Logé dans ce creux, à la commissure de sa bouche, las et vaguement triste derrière ses airs sereins. Il était là, fixant le monde, si petit, si bas. Si lointain du haut de ce perchoir. Elle se souvenait. De tout. De la première fois qu’elle s’était perdue dans le vide, de la première fois qu’elle s’était faite engloutie par ses ombres, disparaissant dans leur monde astral, lacuneux et sombre. De ce vertige si excitant. De la sensation protectrice qui s’était doucement installée au contact de ses ténèbres. À l’abri de la lumière lancinante et aveuglante, de son éclat meurtrissant. Elle se souvenait de tout, de sa chute dans la nuit constellée de Londres, imprimée du silence de la grande cloche et du sommeil des habitants. Doucement, elle se retourna, adossant son dos frêle contre la rampe, et y déposant ses coudes. Les cils courbés de ses paupières se soulevèrent lorsqu’elle posa son regard sur sa compagne.

« Quel homme a crut nous voir voler un jour ? Pourtant nous ne faisons que tomber. »

Surtout elle. Elle le savait. Elle se sentait comme au bord d’une épave, prise dans la tempête, le bois craquant sous ses pieds nus. Elle se sentait les cheveux tirés par le vent, l’eau coulant sur ses paupières. Et l’épave chancelait, glissant lentement sous les eaux mystérieuses et folles, agitées par un frisson gigantesque, comme s’il s’agissait d’une créature terrible. Mais personne ne volait. Les hommes étaient tous des êtres rampants, dangereux. Leur manque d’honnêteté, leur manque de gentillesse, ce manque de bien être qui disparaissait sous la peur d’une vie en communauté, ne ferait jamais de ces êtres une espèce assez légère. Il y aurait toujours un boulet pour les faire redescendre, qu’il s’agisse d’une armée, ou d’un cœur solitaire, perdu dans la foule, trompé, dépaysé. La confiance trahie, les repères bafoués. Empreint de la douleur d’une vie qui ne peut être calme, aux voix extérieures en constante commotion. Un cœur loin du confort, perdu dans des ébats auquel il restera à jamais étranger.

Doucement, elle entrouvrit ses lèvres fines, remplissant ses poumons d’autant d’air qu’il lui était possible d’inspirer. Jusqu’à ce qu’il n’y est plus de place, que ses poumons s’alarment. Qu’ils se débattaient en apnée. Et elle relâcha tout. Cela faisait étrangement du bien. Cela laissait présager qu’elle était encore capable de tout. Qu’elle fonctionnait. Et c’était tout ce qui lui fallait pour mettre au point sa vengeance. Car chaque jour défilait, chaque minute s’écoulait en creusant un peu plus en elle cette absence insupportable. Chaque jour la douleur s’éveillait et l’envie de vengeance se faisait un peu plus ressentir. Et l’ombre silencieuse ferait alors des ravages dignes d’une tempête. Elle glissa ses doigts pâles dans ses cheveux d’un encre noir, ressentant les nœuds qui traînaient dans sa chevelure négligée.

« Tu me fais confiance ? »

C’était une question étrangement posée, comme si la réponse était évidente et négative. Dans le coin de ses lèvres flottait toujours ce sourire curieux, son visage fin étroitement cadré par de longues mèches sombres, presque maladive. Il semblait correct de refuser mais la vraie solution semblait être celle totalement folle d’accepter cette main que l’adolescente levait, comme s’il s’agissait d’un geste moqueur adressé au monde tout entier, mais également d’une invitation à défier les lois. Les doigts écartés et la paume ouverte au ciel, presque insistante, le Silence fit quelques pas, s’approchant centimètre par centimètre de la Carence. Avec une souplesse féline, elle approcha son visage de l’oreille de sa compagne, murmurant quelques mots.

« Que pourrais-tu craindre ? Tu ne peux plus mourir à présent. »

Son sourire se fit plus doux, comme celui d’une maman rassurant son enfant, indiquant qu’il n’y avait rien à craindre, qu’il fallait laisser faire le monde, qu’il tournerait, chuterait, qu’il danserait jusqu’à son extinction, et qu’il n’y avait rien à faire. La Noah fit glisser une mèche blanche entre ses doigts. Leur odeur fraîche s’attarda dans l’air. Et un gloussement enfantin s’échappa des lèvres de Meian, deux notes à peine audibles, semblables au rire d’un enfant.

Elle recula et tournoya en un même mouvement, se rapprochant d’un geste rapide vers le vide et la barrière qui l’en séparait. D’un geste de la main, elle éveilla une ombre semblable à la patte griffue d’un monstre, qui trancha le métal et réduit la barrière en lambeaux. Puis elle fit un pas. Un pas qui l’amena au bord du vide. Moqueuse, elle se tourna vers la Carence, et leva à nouveau la main.

« Tu peux fermer les yeux, si tu veux ~ »

La vraie vie est absente. Nous ne sommes pas au monde.

I don't know how to manage me
You took the key, swam to the sea
Today's the day I hit the floor
I don't think I can fly anymore


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MessageSujet: Re: Éveil. Ended.   Éveil. Ended. Icon_minitimeLun 30 Avr - 1:33

https://www.youtube.com/watch?v=eaaStXvn0LY&feature=related

Ne ferme pas les yeux Anne. Garde les bien ouverts car il y a tant à voir ici, tant de choses que tu ne peux apercevoir quand tes pieds sont solidement ancrés sur le sol que tu as l'habitude de fouler. Même si ta peur t'engourdit l'esprit, tu te dois de rester attentive à tout ce qui t'entoure, à tout ce que tu n'as pas l'habitude de voir. Et essaie de te détendre aussi, tu n'as absolument rien à craindre et tu le sais. Alors cesse de te torturer l'esprit et laisse tomber cette peur aussi inexplicable que ridicule. Tu n'as juste rien à craindre, regarde tous ces gens autour de toi, ils n'ont pas l'air de tant s'en faire, eux. Enfin, en même temps, tu n'as jamais rien fais comme les autres et tu t'en fiches de ce qu'ils pensent, n'est ce pas ? Oui, évidemment, comme je m'en doutais. Mais pourquoi Anne ? Pourquoi ? Tu refuses qu'ils te rejettent, c'est pourquoi tu n'oses jamais aller vers eux, mais et toi ? Tu ne veux pas que l'on t'approche de trop près non plus. Tu ne sais pas ce que tu veux, tu ne sais pas quoi faire. Tout se mélange en toi, t'échappe, en te laissant sur place sans que tu puisses faire quoi que ce soit pour changer la donne, tu ne peux que subir. Ou c'est ce que tu te dis, pour éviter de t'en vouloir de rester si passive. Mais quelque part... Au fond de toi, tu le sais que tu peux faire bouger les choses, hein ? Mais à quoi bon ? Tu n'as plus rien qui te tienne vraiment à cœur, qui fasse vivre ton âme, qui te donne envie de sourire, de rire. De vivre tout simplement. Cela fait des années que cela dure, depuis que ta famille a été brisée en mille morceaux. Tu n'as toujours pas compris comment cela s'était produit du reste. Tu étais tellement heureuse, entourée par ces deux êtres qui t'avaient donné la vie, qui te souriaient si chaleureusement, qui tenaient ta main pour t'aider à te relever. Et puis le lendemain, plus rien. Juste ce grand vide et cette froideur que tu n'aurais jamais pensé connaître, que tu n'aurais jamais voulu connaître. Tu avais été tellement heureuse, tu avais tellement aimé cette vie que tu étreignais de toute la force de tes maigres bras. Mais tu étais aussi tombée de tellement haut que tu n'avais jamais pu t'en relever véritablement, quoique tes proches aient pus dire. Leurs mots avaient pénétré ton âme, l'avaient meurtries en y laissant de profondes cicatrices. Tu avais beau essayé de marcher, de courir comme avant, tu n'avais fais que tituber, puis trébucher. Cela avait été douloureux. Bien plus que tu ne l'avais laissé paraître, bien plus que tu n'avais pu te le dire. Tu t'étais mentis à toi-même pour mieux dissimuler ta triste existence. Tu t'étais cachée derrière un tas d'illusion, puis au final tu avais renoncé. Pour quelles raisons devais-tu continuer de faire semblant de sourire ? Pourquoi ? Pour qui ? Tu n'avais plus personne sur qui t'appuyer, sur qui compter. Tu le savais, tu étais égoïste, mais tu ne pouvais rien faire pour changer cette mentalité qui était la tienne. Tu ne pouvais rien y faire. Comme d'habitude.
Le vent te fouetta le visage, te ramenant brusquement à la réalité. Tes yeux papillonnèrent quelque peu, marquant ainsi ta surprise. Ah, oui. C'était vrai, tu étais au sommet de cette immense tour de métal maintenant. Tu n'aurais jamais dut monter. Idiote comme tu l'étais, tu n'avais pas une seule seconde que tu pouvais être sujette au vertige. Idiote. Tu étais vraiment idiote. Un léger frisson te parcourut l'échine quand un nouveau courant d'air souffla sur la capitale française, secouant au passage tes mèches aussi blanches que la neige. D'un mouvement sec et rapidement, tu les remis en place derrière ton oreille, tandis que tes pupilles grises repartaient à la recherche de celle qui t'avait accompagné jusqu'ici. Cela te prit quelques secondes tout de même, car la hauteur t'étourdissait un peu. Et puis tu la vis, là, appuyée à la rambarde, seul rempart qui la séparait de ce vide que tu haïssais tant. Sa longue chevelure noire dansait selon les caprices du vent, d'une façon que tu qualifierais volontiers de gracieuse, harmonieuse. Tu n'aurais jamais cru dire ça dés que tu l'avais vu. Selon toi, lors de votre premier échange, elle ressemblait plus à une drôle de poupée, désarticulée à cause des coups qu'elle avait encaissé. Elle avait eu l'air si fragile, comme si le moindre coup de vent avait la possibilité de la faire s'effondrer. Tu en as presque eu peur pour elle, quand tu l'avais vu la première fois. Tu craignais qu'elle ne soit blessée, ou quoique ce soit d'autre. Tu t'étais inquiétée pour elle, toi qui n'avais jamais voulu accepter qui que ce soit dans ta vie, toi qui n'avais jamais voulu t'inquiéter pour personne, sachant pertinemment que cela se terminerait mal. Mais au final, tu ne pouvais pas complètement passer à côté de tous ces sentiments dont tu te croyais immunisée.

C'était dur à admettre, mais c'était ainsi. Tu avais fais tout ton possible pour résister, mais au final tu en étais incapable. Tu ne pouvais que soupirer en contemplant ta propre faiblesse. Que faisais-tu encore là, hein ? Pourquoi n'étais-tu pas redescendue loin de cette atmosphère qui te mettait mal à l'aise ? C'était à cause d'elle, tout simplement. Tu ne pouvais pas la laisser seule. Ou du moins, tu ne voulais pas te retrouver seule. Pas maintenant. Tu n'étais pas d'humeur solitaire actuellement, et un peu de compagnie ne te ferait aucun mal, n'est ce pas ?
Distraitement, tu continuais de fixer son dos, te demandant à quoi elle pouvait bien penser ainsi penchée vers le vide. Timidement, presque craintivement, tu fis quelques pas dans sa direction et t'arrêtas à quelques centimètres d'elle. Tu ne prononças pas un mot, n'émis pas le moindre son. Ton regard avait maintenant dérivé vers l'espace qui te semblait infini, l'espace qui te séparait de la terre ferme. C'était vraiment une impression désagréable, cette impression d'être piéger entre Terre et Ciel, cette impression d'être tiraillée entre les deux. Cela te donnait le tournis. C'est pourquoi tu préféras fermer les yeux, le temps de te sentir un peu plus stable, puis les rouvrit, voyant maintenant ton interlocutrice tournée vers toi. Tes yeux, aussi froid que l'acier, s'ancrèrent dans son regard bleu où brillait une lueur que tu ne parvenais pas à décrire. Tu attendais qu'elle parle, et c'est ce qu'elle fit.

« Quel homme a crut nous voir voler un jour ? Pourtant nous ne faisons que tomber. »


Tu ne répondis pas, te perdant une nouvelle fois dans tes pensées. Ces simples mots t'avaient rappelé l'histoire d'un homme qui s'était fait des ailes. Il avait voulut voler, s'était trop approché du soleil, tellement que ses ailes avaient finies par brûler à cause du soleil. Comment s'appelait-il déjà ? Icare, selon tes quelques souvenirs de ce mythe que l'on t'avait conté quand tu n'étais encore qu'une enfant incapable de comprendre la morale de cette triste histoire. Mais maintenant que tu étais assez âgée, que tu avais vu assez de choses pour en saisir le sens, tu ne pouvais que plaindre ce pauvre homme qui n'était en réalité que le reflet de ces êtres grouillants autours de vous, de ce que tu avais été auparavant. Et quelque part, tu ne pouvais t'empêcher d'éprouver un peu de pitié à leur égard: ils ne voyaient pas ce qui les attendait, même si c'était plus que prévisible. La chute était inévitable, mais eux étaient trop effrayés pour ouvrir les yeux et voir enfin leur fin. Tu les plaignais, mais au final tu étais pareil qu'eux, tu avais été pareil qu'eux. Les choses avaient maintenant changé: cette fin était maintenant perdue dans un brouillard dans lequel tu ne pouvais pénétrer, tu ne pouvais plus t'emparer de ce qui t'avait un jour parut si proche et si palpable.

Quel dommage, n'est ce pas ?

Toi qui avait tant attendu cet instant, n'ayant pas le courage de mettre fin à tout cela par toi-même, préférant laisser le Temps faire son travail. Toi qui avait espéré qu'un jour ta douce torture prenne fin. Te voilà prise au dépourvue, privée de ce qui t'aurait soulagée. Tu étais prise au piège dans une existence dont tu ne voulais pas, dont tu ne pouvais te défaire. Tu n'étais plus maître de rien, pas même de ta propre vie. Tu n'étais qu'une marionnette dont les fils avaient été coupés, tu ne pouvais plus bouger, plus parler. Pauvre petite, si tu te voyais, si tu prenais enfin conscience que tu n'étais qu'un être misérable, haïssable qui n'avait rien à faire ici.

« Tu me fais confiance ?


Oui. Non. Peut-être. Que répondre à cette étrange question ? Pourquoi lui ferais-tu confiance ? Tu ne la connaissais pas avant aujourd'hui, tu ignorais encore tout de son existence hier et aujourd'hui la voilà. Alors pourquoi lui ferais-tu confiance ? Tu n'avais aucune raison de le faire voyons. Et pourtant, tu en avais terriblement envie. Tu ne savais pas pourquoi, mais tu le voulais. Et tu savais, qu'en ce bas monde, il n'y avait rien de plus terrible que de lutter contre ses envies. Alors tes lèvres s'entr'ouvrirent discrètement, et se mouvèrent, laissant des sons mourir dans l'air qui t'entourait.

« Oui... »


Ta voix te semblait désagréable, éraillée, elle t'écorchait les oreilles. Quelle idée avais-tu eu d'ouvrir la bouche, tu aurais tout aussi bien pu te contenter d'hocher la tête, cela aurait été amplement suffisant. Mais peu importait, tu avais déjà laisser cet unique mot t'échapper, tu ne pouvais pas retourner en arrière. Alors simplement, tu te contentas de toussoter quelque peu, dans l'espoir de dégager le nœud qui semblait avoir élu domicile dans ta gorge. Tes yeux, eux, quittèrent le visage pâle de l'adolescente qui te faisait face et s'échouèrent sur cette main qu'elle te tendait. Tu n'esquissas pas le moindre geste pour effleurer cette paume du bout des doigts, tu restas là, à la regarder comme une idiote, sans savoir vraiment quoi faire. Tu ne cherchas même pas à la repousser, tu fermas juste les yeux, dissimulant tes pupilles argentés derrière tes paupières. Tu la sentais maintenant proche de toi, beaucoup trop proche. Tu reculas d'un pas, mal à l'aise, ce qui ne l'empêcha néanmoins pas de te souffler quelques mots que tu n'eus aucun mal à percevoir au creux de ton oreille.

« Que pourrais-tu craindre ? Tu ne peux plus mourir à présent. »


Fort bonne question que voici, mais dont tu ne pouvais te résoudre à fournir une réponse digne de ce nom. Tu allais te ridiculiser, tu le savais, et tu ne pouvais l'accepter. Cette crainte qui te tordait le ventre, qui te prenait aux tripes, tu ne pouvais vraiment l'expliquer. C'était ainsi, tu avais peur de tomber, du vide, de la chute, du choc de l'impact. Cela t'horrifiait, tu craignais tant de te briser, que ce gouffre ne t'engloutisse, que cela te fasse souffrir. C'était inévitable, à la fin, tu le savais. Tu souffrirais, et le fait de savoir cela faisait disparaître ce bref sentiment de liberté que tu pouvais ressentir lors de ta chute. C'était ridicule, cela exposait aux yeux de tous toute la faiblesse dont tu pouvais faire preuve.

Tu rouvris les yeux quand tu sentis ses doigts jouer avec tes cheveux blancs. Elle te fixait, un air doux peint sur les traits fins et fragiles de son visage. Et là, tu avais l'impression d'être redevenue une simple enfant, et tu avais horreur de ça. Tu étais démunie, tu étais faible...
Et puis, à ta plus grande surprise, elle se mit à rire. Tu ne sus pas pourquoi, et tu n'étais pas certaine de le vouloir. Tu avais l'impression que ta ''sœur'' ne vivait pas dans le même monde que toi. Tu ne pouvais l'expliquer, c'était comme ça, à la fois si proche et si éloignée. Tu pouvais tendre la main, et la toucher de tes doigts blafards, mais tu savais que cela ne te suffirait pas pour te prouver qu'elle était bien là, face à toi. Tu ne pouvais mettre des sur ce phénomène que tu ne parvenais pas à comprendre toi-même. Ainsi, tu la regardas, toujours aussi silencieuse, se rapprocher du vide comme une enfant de cinq ans impatiente de monter sur un manège.

Et d'un geste, une ombre s'éveilla, détruisant le seul rempart qui les séparaient du vide, qui les empêchait de chuter.

« Tu peux fermer les yeux, si tu veux~ »


Cette fois-ci, tu n'hésitas pas et te saisis de la main qu'elle te tendait. Tes doigts froids se refermèrent sur sa paume, et tu la sentis faire de même. Vous étiez si proches du vide, trop proche à ton goût, ton ventre se noua pendant que ton esprit commençait à s'embrouiller, anticipant la chute prochaine. Tu n'avais plus aucune pensée cohérente, tout ce bousculait dans ta tête, sans que tu puisses rien faire pour y remettre de l'ordre. Une seule chose t'obsédait, le vide qui s'étendait sous tes pieds. Jetant un dernier regard par dessus ton épaule, tu pus voir que les personnes qui se trouvaient autour de vous avaient déserté les lieux, comme s'ils sentaient que ce qui allait suivre ne les regardait pas. Tu haussas les épaules et tu te retournas, tendue. Tes lèvres s'entr'ouvrirent pour laisser échapper un soupire qui mourut aussitôt. Comme te l'avait si bien conseillé la brune, tu fermas les yeux avant de faire un pas en avant, là où plus rien ne te retenait. Ta prise sur la main de ton accompagnatrice se raffermit quand tu sentis que ton corps était inévitablement attiré vers le bas. L'air s'engouffrait parmi tes mèches incolores et les pans de tes vêtements. Tu aurais pus crier tellement ton cœur battait vite contre tes côtes, mais tu n'en fis rien: le nœud dans ta gorge ne te le permettait pas. Il te sembla même un instant que ton cœur pouvait s'échapper, ayant briser la prison que formaient tes côtes. Bien malgré toi, tu ouvris les yeux, ayant la désagréable impression que la chute durant maintenant depuis un siècle au moins. Tu ouvris la bouche: tu avais presque oublié de respirer.

Et cette peur qui ne te quittait pas. Quand cela allait-il donc finir ?

Et puis, les ombres du Silence se mouvèrent, s'enroulant autour du corps de leur propriétaire et du tien. Tout sembla se ralentir, avant de finalement s'assombrirent. Tu ne pus plus rien distinguer en cet instant, tu n'avais conscience que de cette main que tu ne parvenais pas à lâcher, que tu craignais de voir disparaître.
L'impact qui aurait normalement dut arriver suite à cet instant de flottement ne vint jamais, grâce à l'intervention des ombres que tu ne pouvais que bénir. Tu ne touchas jamais le pavé qui se trouvait au pied de la tour Eiffel, ni ne revit ladite tour. Ta peur se calma, jusqu'à disparaître totalement, et tu soufflas enfin, soulagée de ce poids qui n'avait jamais eu lieu d'être. Tu avais dis que tu faisais confiance à Meian, de ce fait, tu n'aurais pas dus t'inquiéter tant. Et comme elle te l'avait si bien fait remarquer plus tôt, la Mort ne faisait plus partie des choses que tu devais craindre. Néanmoins, c'était plus fort que toi, tu ne contrôlais pas tes sentiments, tu ne pouvais rien y faire.

Tu ne distinguais toujours rien, mais tu ne pus t'empêcher de cligner des yeux, comme si cela allait te permettre de voir enfin. D'une voix faible et tremblante, tu brisas le silence.

« Meian … ? »


Tu le savais, elle était encore à tes côtés. Mais tu n'avais pus supporter ce silence d'avantage. C'était oppressant, étouffant. L'interpellée ne répondit pas, toutefois, tu perçus sans le moindre mal sa respiration régulière. Et cela te suffit amplement.
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